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La "polémique de la burqa" en France : air du temps
samedi 19 juillet 2008 par Topics & Roses , Karine Gantin
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- COMMUNIQUE DE LA ZEP : "Le communautarisme d’Etat a encore frappé"., p1
- Une vision oppressive de la laïcité, p1
- Une vision coloniale de l’émancipation, p1
- Une vision assimilatrice de la nation, p1
- PS. Qu’est ce que la Zone d’Ecologie Populaire ?, p1
- ANALYSE DE JEAN BAUBEROT, p1
- ANALYSE DE HAPPYPENG, p1
- Burqa / post d’Alain Gresh sur son blog Nouvelles d’Orient, p1
- A PROPOS DE L’IMAGE, p1
Je vais commencer par contredire mon titre : il s’agit en réalité, sous le terme de la "burqa" hautement médiatisé tout récemment dans une vaste polémique publique, d’évoquer le "niqab" noir, et non la tenue bleue afghane.
Cette polémique a été déclenchée par la médiatisation d’un arrêt du Conseil d’Etat refusant la nationalité française à une femme marocaine au motif qu’elle aurait « adopté, au nom d’une pratique radicale de sa religion, un comportement en société incompatible avec les valeurs essentielles de la communauté française et notamment le principe de l’égalité des sexes. » Etait mis en cause, explicitement, le port de la burka par la dame.
Il y a aujourd’hui inflation de la prose produite en France au fil des "affaires" diverses entre elles mais touchant toutes au final à l’islam et à la vie privée... Et si les enjeux sont en général réglementaires et législatifs, la polémique médiatique non seulement domine l’espace public mais le structure et l’oriente, dans un contexte constamment brouillé et prêt à de nouvelles obscures fractures, y compris à l’intérieur des "camps" en présence (laïcité ouverte Vs. laïcité intransigeante, ou, pour reprendre le vocabulaire polémique, communautaristes islamo-gauchistes Vs. républicains réactionnaires et islamophobes). Il est dès lors difficile de suivre et plus encore de refléter la production établie, au risque de donner plus à souffrir de l’ampleur du bruit produit qu’offrir une lisibilité réelle...
Difficile également d’opérer un tri utile pour une mise en opposition épurée du débat en trois ou quatre textes, tant chaque production implique une contextualisation ou appelle un commentaire... Ce serait une façon hypocrite et fausse de prétendre "faire écho", en réalité de reconstruire le débat artificiellement en choisissant "ses" arguments et "ceux de l’adversaire", même en prétendant le contraire, bref de prendre parti sous couvert de fausse objectivité...
Difficile, enfin bien sûr, de se taire en attendant que la patine du temps permette des synthèses majestueuses... Car nous entrons toujours plus avant dans les turbulences, nous nous y enfonçons, et c’est précisément celles là que ce site veut donner à voir, toucher et comprendre...
Alors voilà, Topics & Roses a tranché à sa façon. Pas de ligne fermement établie. Mais l’idée de surprendre, en ayant conscience des choix. D’insister sur tel ou tel aspect. Donner à lire des argumentaires divers entre eux. Tout en se réservant le droit d’opter pour des textes différents la fois suivante, au gré des humeurs, des découvertes et surtout des enjeux et des acteurs en présence. Des choix en partie intellectuels et politiques, mais avant tout journalistiques.
Comme ce communiqué aux allures pamphlétaires de la ZEP (Zone d’écologie populaire), présenté ci-après en premier, intéressant à publier à plus d’un titre :
il exprime de façon radicale et très argumentée/construite une des principales positions en présence, en le resituant dans une déconstruction explicite du schéma de "guerre des civilisations", articulé ici dans sa déclinaison nationale française et contemporaine, en lien particulièrement à l’actuel ministère de l’Identité nationale mis en place sous le président Sarkozy.
il le fait à partir d’une série d’arguments en adéquation réelle avec l’objet traité. Que ces arguments soient acceptés ou discutés âprement, du moins ont-ils le mérite d’apporter une clarification du débat, là où d’autres textes partent sur toutes sortes de pistes, sans traiter le fond de l’affaire, évoquant une fois de plus l’histoire de l’islam, etc.
il revient sur l’enjeu de l’émancipation féminine dans ce contexte, en connaissance des débats (et fractures) actuels dans le champ féministe occidental en mutation, en adéquation avec l’esprit qui a par ailleurs présidé à la création du site Topics&Roses.
il se situe dans le champ des luttes sociales et anti-impérialistes et témoigne d’une articulation pensée des luttes.
il émane d’un groupe militant globalement jeune. Or, si les analyses purement intellectuelles et universitaires sont bienvenues et valorisées sur Topics&Roses, le site se donne néanmoins pour vocation d’abord de donner visibilité aux mouvements militants, et de montrer les champ où ceux-ci opèrent en jonction aux grands débats du temps.
Dans un autre registre que celui de la ZEP, et avec des arguments différents, Jean Baubérot produit lui aussi une lecture critique de la décision du Conseil d’Etat. La présentation longue et complexe (y compris sur le plan iconographique...) de ses arguments est une entrée formidable dans les méandres juridiques et autres aspects de la polémique, pour un exercice intellectuel remarquable accompli par un personnage éminent de la société française sur ces questions, puisqu’il s’agit du titulaire de l’unique chaire universitaire en France ayant pour objet explicite l’étude de la laïcité. Le commentaire de Jean Baubérot est ici présenté en quelques phrases à la suite du communiqué de la ZEP, avec bien sûr indication du lien et plusieurs longs extraits significatifs.
Troisièmement, un texte publié sur AgoraVox par un certain HappyPeng, présenté comme "étudiant à l’école des Mines de Paris, politiquement proche du Parti Communiste Français, passionné, outre de politique, d’informatique, de culture populaire japonaise moderne et du Japon en général" a retenu notre attention par son caractère pamphlétaire assez remarquable. Cité et reférencé ici, ce texte est complété in extenso par un autre texte du même auteur qui mérite au moins tout autant lecture. Trouvé sur son blog personnel et intitulé "laïcité", il resitue finement les polémiques en cours dans le cadre de la politique actuelle de droite face à la résurgence des religions pour rappeler la gauche aux enjeux de lutte pour l’émancipation de tou-te-s.
Quatrièmement, est reproduit intégralement le post très bref d’Alain Gresh, directeur adjoint du Monde Diplomatique, sur son blog "Nouvelles d’Orient", dont le ton fait écho à l’opinion de beaucoup de personnes, particulièrement parmi les musulmans...
Enfin, plus encore que pour d’autres articles de ce site, il a été difficile d’opérer un choix iconographique. Celui-ci appelait quelques commentaires que vous trouverez en guise de conclusion temporaire.
A suivre.
Karine Gantin, éditrice de Topics&Roses
COMMUNIQUE DE LA ZEP : "Le communautarisme d’Etat a encore frappé".
L’idéologie du ministère de l’identité nationale a fait des émules au Conseil d’Etat. Son arrêté du 27 juin a confirmé un décret de 2005 refusant la nationalité française à une Marocaine de 32 ans, sous prétexte que sa burqa était « incompatible avec les valeurs essentielles de la communauté française ». Est-il besoin de rappeler que le salafisme, dont se réclame cette jeune femme, est un courant de l’islam que l’on peut avoir de très bonnes raisons de combattre, mais qu’y souscrire n’est pas un délit en soi ? Et que porter la burqa n’est pas un crime ? Cette décision, après les polémiques effarantes concernant le foulard d’élèves ou de parents d’élèves, dessine un climat de rejet et de stigmatisation de l’islam, des musulmans et de tout ce qui ressemble à autre chose qu’à soi-même.
Une vision oppressive de la laïcité
Cette décision s’est basée sur l’observation minutieuse des pratiques religieuses d’un individu. Or, dans un pays laïc, ce ne sont pas les individus qui sont « laïcs », ce sont les institutions. La vraie laïcité, c’est la neutralité de l’Etat, pas la neutralité des individus ! Le Conseil d’Etat n’a aucune légitimité pour s’immiscer dans la conscience et l’intimité des individus et porter sur eux des jugements sans appel. Ainsi a-t-on appris que « les services sociaux et la police » étaient allés jusqu’à s’enquérir du sexe du gynécologue de la dame !
Une vision coloniale de l’émancipation
Une fois de plus, au nom d’un certain féminisme, on plonge la tête sous l’eau de femmes qu’on s’échine pourtant à qualifier de victimes, et on exclut une femme sous le prétexte paradoxal qu’elle n’est pas assimilée. Faudra-t-il bientôt emprisonner les séropositifs coupables de s’être mal protégés, donner des amendes aux pauvres pour les inciter à la richesse ou punir les victimes d’agression pour leur apprendre à se défendre ? N’oublions pas qu’il y a encore 50 ans on asservissait des peuples pour leur apprendre la liberté et que le Parlement a encore voté en 2004 une loi sur les signes religieux pour émanciper les filles voilées en leur interdisant l’accès à la scolarité… A l’inverse de cette vision fétide, la ZEP défend une lutte contre toutes les discriminations qui ne peut se mener sans les discriminé-e-s, et encore moins contre elles et eux.
Une vision assimilatrice de la nation
Enfin, cette affaire révèle la dangerosité d’une conception nationaliste de la « nationalité » selon laquelle être, demeurer ou devenir français « se mérite ». Et nécessite un examen de passage, auquel les bons Français de naissance eux ne sont bien sûr jamais soumis (ironie de l’histoire, le mari qui est censé oppresser sa femme, lui, reste français). A l’heure où les responsables politiques de tout bord n’ont que le mot « diversité » à la bouche, cette vision ethno-culturelle de la « communauté française » prouve que la France a toujours un problème avec la différence ! L’explication du jugement, qui ne fait que reprendre les termes du code de la nationalité, vient d’ailleurs confirmer cette vision bien coloniale et bien française : la dame n’a pas prouvé son « assimilation » ! On est loin du « plébiscite de chaque jour » qui tient lieu de définition de la nation à la française... Mais très proche d’un « communautarisme national » ! La ZEP appelle donc à réformer le code de la nationalité et le code civil pour dissocier l’acquisition de la nationalité de toute idée de mérite. Pour que la France, à la veille du 14 juillet, ne se résume pas au rassemblement des « imbéciles heureux qui sont nés quelque part » (Brassens)…
Zone d’écologie populaire, 13 juillet 2008
Contacts : www.zonedecologiepopulaire.org
PS. Qu’est ce que la Zone d’Ecologie Populaire ?
La ZEP est un réseau politique réunissant des militants Verts et non-Verts qui se définissent comme :
partisans d’une écologie de transformation : L’économie productiviste à outrance détruit la biodiversité, la santé, s’attaque aux peuples autochtones, pille les richesses du Sud, et recolonise son économie. Si les injustices environnementales et sociales, la crise climatique, énergétique, les OGM, le nucléaire, les pesticides, l’amiante… nous concernent tous, elles s’attaquent partout en priorité aux pauvres.
partisans d’une écologie anti-discrimination qui lutte contre l’apartheid social. Nous refusons la stigmatisation des jeunes issus de l’immigration, la ségrégation des quartiers populaires, le contrôle policier à caractère colonial, la politique de l’immigration (ADN, expulsions des sans papiers, lois racistes…).
partisans d’une écologie de libération qui lutte contre la guerre de civilisation et l’apartheid planétaire. De l’Irak à l’Afghanistan, de Palestine à la Tchétchénie, de l’Iran au Congo, nous refusons la guerre comme moyen d’imposition du modèle occidental. http://www.zonedecologiepopulaire.org/spip.php ?article61
ANALYSE DE JEAN BAUBEROT
Jean Bauberot est Professeur des Universités, Président d’honneur de l’Ecole Pratique des Hautes Etudes - Titulaire de la Chaire « Histoire et Sociologie de la Laïcité », EPHE (Sorbonne). Lire ici un peu plus de ses titres et son parcours. Dernier ouvrage paru : L’intégrisme républicain contre la laïcité, Paris, éditions de l’Aube, 2006. Sur son blog, il commente l’actualité au prisme de la question de la laïcité. Il a posté sur ce blog justement un très long commentaire de ce que les médias et l’opinion nomment aujourd’hui couramment "l’affaire de la burqa", post qu’il a intitulé CONSEIL D’ETAT ET REFUS DE NATIONALITE... Les purs et la « soumise ». Ou : Ce que c’est que la France toute cathodique sous le règne du dit Conseil. Il est impossible de condenser ce commentaire très dense et touffu, qui se lit facilement et balaie de nombreux arguments du débat pour tenter de les retourner dans tous les sens. Voici quelques éléments piochés qui ne résument pas l’ensemble, à lire impérativement dans son intégralité pour celles et ceux qui ont le temps...
(...)
L’interprétation optimiste de la décision du Conseil d’Etat serait de l’interpréter comme un rappel auprès de toutes les personnes tentées par la sarko-laïcité qu’on ne peut évacuer la question des valeurs fondamentales qui fondent le lien social.
Et certainement, l’égalité des sexes fait partie de ces valeurs. C’est même sans doute ce que la modernité a découvert de mieux en matière de valeurs, ou (en tout cas) parmi ce qu’elle a découvert de mieux.
Donc que la valeur d’égalité des sexes figure parmi les principes qui doivent être à la base des lois, des règles sociales, du fonctionnement de la société : OK, mille fois OK.
Que la société s’impose cette règle à elle-même chaque jour un peu plus, toujours mille fois OK. Et il y a encore pas mal à faire à ce sujet, non ?
Mais ensuite ? Que se passe-t-il concrètement ? Les partis politiques qui ne respectent pas la règle de la parité en matière de candidature, payent une amende, ils ne sont pas interdits pour autant. Ils sont même tellement peu critiqués, que s’en est même un peu honteux.
Il faut dire d’ailleurs que la loi sur la parité est bien récente. Que la première loi qui allait dans ce sens, en 1982 (et qui aurait fait qu’elle serait mieux pratiquée aujourd’hui) avait été retoquée par le Conseil constitutionnel.
Alors, la question de l’égalité des sexes ne se posait pas en matière de citoyenneté, puisque le citoyen était censé ne pas avoir de sexe. Et donc, on pouvait discriminer en toute bonne conscience. Et on ne s’est pas dispensé de le faire. Et on le fait encore allègrement…
Par ailleurs, l’Eglise catholique n’admet pas les femmes à la prêtrise, y voit-on un « comportement en société incompatible » avec la « valeur essentielle » de « l’égalité des sexes » qui rendrait cette Eglise incompatible avec la société française ?
(...)
Quand on prétend obliger les gens d’ « adhérer » à des « valeurs essentielles », que l’on transforme ainsi en croyances obligatoires, c’est toujours une certaine interprétation de ces valeurs que l’on veut imposer. La sienne, qui n’est pas forcément la plus intelligente !
Et c’est là aussi que le bas blesse : il n’existe pas de valeurs en soi ; il n’existe que des valeurs interprétées. Et c’est pour cela qu’une société démocratique est en risque de totalitarisme quand elle évacue le débat interprétatif sur les valeurs, quand elle fait comme si la représentation des valeurs était univoque.
La société, quand elle cherche à contraindre à adhérer à des valeurs, cherche en fait à rendre obligatoire l’interprétation dominante de telle ou telle valeur, faite par le groupe dominant, à un moment donnée. Interprétation dominante très souvent considérée comme fallacieuse cinquante ans ou cent ans plus tard.
L’interprétation dominante est actuellement produite et véhiculée, de façon dominante, par le moyen de la communication de masse. L’interprétation dominante c’est le médiatiquement correct. « Ce que c’est que la France toute cathodique sous le règne du Conseil d’Etat… »
(...)
L’arrêt du Conseil d’Etat est un arrêt de religion civile ; c’est une décision plus religieuse que laïque. C’est la religion civile républicaine, non la laïcité.
ANALYSE DE HAPPYPENG
Dans "Burqa ou francité" publié par AgoraVox, HappyPeng, étudiant à l’école des Mines, dresse un pamphlet voltairien ainsi introduit : " Les réactions sur la récente affaire dite de la burqa tendent à montrer que certains souhaiteraient voir défini le droit à la nationalité en termes de coutume, d’image, de culture ou de valeurs, en bref, d’une certaine francité. Il serait pourtant temps de se rendre compte de l’incohérence de cette idée, en fait simplement révélatrice du malaise de notre société face à la réalité d’aujourd’hui.". Finement irritant sous une grossièreté apparente de l’argumentaire utilisé, essayant de définir sur un mode loufoque la francité à partir de critères vestimentaires ou culinaires savamment discutés, il chute ainsi : "(...) Dès lors, si j’ai le droit à la nationalité française alors que je viole sans aucun doute un très grand nombre de critères de francité, au point sans doute d’être considéré comme membre de l’Anti-France par certains co-détenteurs de passeport République française, pourquoi quelqu’un d’autre qui vivrait comme moi n’y aurait pas droit ? En réalité, alors que par le passé la distinction entre les peuples nationaux pouvait relativement bien se faire en pratique à cause de leur isolement relatif, le développement des échanges matériels et humains par les moyens de transport et de communication ont eu pour effet de brouiller toutes les frontières en permettant aux individus de connaître et souvent d’adopter certains caractères qu’ils pouvaient rencontrer. Cette idée d’une possible distinction, rationnelle ou pratique, est donc morte car incompatible avec la réalité de notre monde. La crispation autour de l’idée d’identité nationale, source de toute cette folie, est liée à l’attachement sentimental irraisonné à une pensée aujourd’hui invalidée. Elle ne pourra que disparaître, avec plus ou moins de douleur." Mais son texte le plus intéressant à communiquer dans le cadre de la polémique qui nous déchire a été publié sur son blog le 1er juin 2008. Le voici :
06/01/08. Laïcité, par HappyPeng
On ne reconnaît habituellement qu’une religion pose problème que lorsqu’elle constitue un risque potentiel pour le système capitaliste libéral dans lequel nous vivons. De fait, ces religions ont donc un potentiel subversif.
C’est à cause de celui-ci que les nombreux individus touchés de plein fouet par le malaise créé par cette société se tournent en nombre de plus en plus important vers ce type de communautés religieuses.
Or, qu’est-ce que le processus de laïcisation tel que nous l’entendons dans la bouche des libéraux, sinon le fait de rendre les religions aptes à rentrer dans le cadre libéral, ou, à défaut, de marginaliser et stigmatiser celles qui ne le feraient pas, leur retirant ainsi tout aspect nocif pour lui ?
Ce processus peut donc être vu comme la condition sine qua non du fonctionnement de l’opium du peuple comme instrument des puissances qui font l’ordre social, même si la résurgence des intégrismes en période de crise nous montre qu’il est de toute façon voué à l’échec.
L’attitude ambivalente de la laïcité promue par la droite, qui dit oui à, voir encourage, la croyance qui se veut inconditionnelle, et simultanément y porte des restrictions, reflète d’ailleurs cette contradiction.
Pour illustrer ceci, on peut prendre l’exemple des lois interdisant à la religion tout caractère visible en public, par lesquelles on leur enlève tout caractère choquant pour ceux qui n’y prennent pas part, tout en ne faisant rien contre leur effet idéologique sur les populations concernées.
La gauche radicale n’a donc aucun intérêt à aider l’ordre libéral à se maintenir en normalisant la religion pour l’intégrer, puis se renforcer, par cette laïcité.
Ce qu’elle devrait favoriser, c’est la prise de conscience par la classe dominée du fait que son malaise est dû à la structure de la société et que le seul moyen d’y remédier est la lutte politique permettant de le dépasser. Par conséquent, la seule laïcité qu’il ait un sens pour elle de défendre est celle qui permette l’émancipation de chacun, pour parvenir à ce fait.
HappyPeng
Source : http://blogs.hurdfr.org/
Burqa / post d’Alain Gresh sur son blog Nouvelles d’Orient
"Ne vous inquiétez pas. Je ne vais pas revenir longuement sur la énième polémique concernant l’islam en France. La seule chose dont on est certain est que ce n’est pas la dernière. Mais je ne peux m’empêcher de noter cette phrase dans Libération des 12 et 13 juillet : « Y a-t-il davantage de frictions entre la laïcité et l’islam ? Difficile à dire, le moindre incident concernant des musulmans étant systématiquement monté en épingle. » La journaliste écrit ces quelques lignes dans un numéro dont le gros titre de Une est : « La France ou la burqa » ; et n’est-ce pas Libération qui a révélé le fameux arrêté concernant le mariage annulé et la virginité, et qui en a également fait sa Une ?" Alain Gresh, 17 juillet 2008, Blog "Nouvelles d’Orient"
Source : http://blog.mondediplo.net/2008-07-17-Iran-Bolton-a-raison#Burqa
A PROPOS DE L’IMAGE
<doc296|left> L’image choisie en exergue de cet article (et tronquée pour la nécessité du format choisi) est tirée du film A cinq heures de l’après-midi, de la réalisatrice Samira Makhmalbaf (Iran, 2003, 1H46). Ce choix résulte de plusieurs considérations :
- Refus de mettre une photo du Conseil d’Etat sur un texte polémique. Ce n’est pas l’institution mais une de ses décisions qui est visée.
- Refus d’opter pour une photo de burqa comme on opterait pour un chiffon rouge (ou noir...) de surenchère médiatique (la burqa étant devenue dans les média une image surinvestie de sens, une icône paradoxale du discours dominant dans ses ambiguïtés voire ses valeurs effectivement islamophobes. Lire aussi « "La femme musulmane". Le pouvoir des images et le danger de la pitié » par Par Lila Abu-Lughod, in : La Revue Internationale des Livres et des Idées, numéro 6, juillet-août 2008).
- Rappel de la burqa en question via l’image de l’affiche : la burqa évoque à juste titre la tenue bleue des femmes en Afghanistan. En France, dans la polémique récente, on parlait en réalité du "niqab" noir en évoquant la "burqa". Peut-être bien justement parce que l’imaginaire sous-jacent est celui de l’Afghanistan.
- L’administratrice du site a vu le film de Samira Makhmalbaf il y a quelques semaines et garde en tête encore la complexité fine de représentation du réel donnée au spectateur par cette réalisatrice, garde le souvenir du personnage central lui-même ici représenté, jeune fille afghane rêvant de devenir présidente de son pays, entêtée et perdue dans un monde sans repères possibles, entre guerre dévastatrice et patriarcat lui-même complexe et multiple, entre occupation et lointains (européens) eux-mêmes trompeurs. Bien sûr, ce choix d’un film étranger au pays où se situe la polémique "de la burqa" ici évoquée, et ce choix qui plus est d’une histoire de personnage en décalage avec la situation convoquée, sont en contradiction avec les principes habituels du site Topics&Roses, qui tente de circonscrire les enjeux au plus près pour contrer la tentation de l’amalgame. Mais au point de saturation d’image et d’enflement polémique atteint en France, qui sait si le détour, non géographique mais artistique, lui, peut aider... Dire que la burqa n’essentialise pas celle qui le porte. Evoquer un lointain, l’Afghanistan, qui est au coeur de nos inconscients (avec l’Iran, pays de la réalisatrice d’ailleurs !). Rappeler que l’émancipation est affaire complexe. Permettre de respirer un instant.
Karine Gantin
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